vendredi 5 juillet 2019

Blue Lagoon


Lire en premier : L'effet domino

 accident, bonheur, amour, nouvelle, cocktail
 Pour la recette c'est (et l'image) : ici

J’aurais adoré être magicienne, fée ou sirène mais je resterais à jamais une « moldue ». A chacun son karma ! Et le mien c’est d’être documentaliste dans un collège. Non que je ne m’y sente pas à ma place, j’adore les livres, leur odeur, le bruit que font leurs pages quand on les tourne et surtout les histoires qu’ils racontent. Le temps d’une histoire, je suis une autre, je vie une autre vie.

            Le voilà le problème, d’après mon amie Liane, je ne vie ma vie qu’à travers les livres, une vie par procuration en somme. Et ce soir là, quand Liane est entrée dans mon appartement, j’ai sentit sa détermination. Même quand je lui ai fait valoir que je travaillais le samedi matin, elle n’a pas lâché.

-« Julie, tu sors ton nez de tes bouquins et tu viens avec moi à cette soirée. Tu n’es pas obligé de rentrer tard ! »

Je finis par céder et je l’ai suivit au « Blue Bird », la boite branchée du moment. Leurs spécialités, des cocktails à base de curaçao Bleu, au nom qui fond rêver : « Blue Lagoon », « Blue Océan », « Blue Hawaïen » ou « Kir des Dieux »… Givre en sucre glace, fruit, paille, petit parasol ou verre en noix de coco ajoute la note exotique. Le décor fait lui aussi partie du rêve. Autour de la piste de danse de mini-cases séparent les tables et fauteuils en rotin, des guirlandes de fleurs ajoute une note de couleur, et le must : l’écran géant où mer et palmiers s’agitent sous le regard de la lune juste devant la piscine. Tout est fait pour dépayser. Jusqu’aux serveurs et serveuses qui portent des costumes hawaïens. 

Franchement comment résister ? Je commandais donc un « Blue Lagoon » pour me mettre au diapason de cet endroit magique. Très vite, le « Blue Lagon » faisant son effet, je rejoins mon amie sur la piste de danse et m’agite sur les tubes du moment. Au troisième « Blue Lagoon », je me souviens mettre lever pour accompagner les serveuses dans un hula endiablé. Mon déhanché manquait de fluidité mais je m’en foutais, je m’amusais comme une petite folle. C’est là que j’ai croisé un regard lagon bleu et que je pris mon quatrième verre. C’est quelque chose qu’avec le recule, je déconseille fortement. Car à partir de là, ma soirée est un trou noir sans fond, ou pour rester dans le ton, un trou bleu sans fond. J’ai du plonger en apnée dans la mer bleue azur de l’écran géant ou des yeux bleus qui me regardaient intensément.

Lorsque j’ai ouvert les yeux, un petit bonhomme avec un marteau s’était installé à l’intérieur de mon crane et frappait mon front comme un dératé. Bon sang, quelle migraine ! Je ne reconnais même pas ma chambre. Je ferme de nouveau les yeux, espérant que ma vision refasse le point au bon endroit. C’est là que je réalise qu’il y a un poids, pour ne pas dire un bras qui repose sur mon ventre. J’ouvre de nouveau les yeux et tourne la tête, un peu trop vivement au goût de mon crane. Il est évidant que je dois absolument fonctionner au ralentit si non, je risque une explosion cérébrale. Je regarde l’homme, nu comme un ver, endormis à mes côtés. Mon dieu ! J’ai couché avec Morphée en personne à moins que ce ne soit un dieu grec, tout a fait possible, je me rappelle avoir goûté au « Kir des Dieux ». Je contemple pendant un moment la peau bronzé, le corps musclé, les tablettes de chocolat et je décide de ne pas aller plus loin car je viens de me rappeler que l’on est samedi et que je suis attendu au boulot. Et merde ! J’ai foutu quoi de mes fringues ? Comme le petit poucet, je les ai semés de la chambre à la porte, sans doute pour retrouver mon chemin. Je m’habille au fur et à mesure où je me suis, visiblement déshabillée hier soir et je quitte l’appartement sans bruit, pour ne pas réveiller le bel Apollon endormis.

Au volant de ma petite Clio jaune poussin, j’essaye de rassembler mes souvenirs sur la soirée de la veille. Bon sang ! Réfléchir ne fait qu’empirer ma migraine. Une chose est sûr, à ma langue chargée et à mon crane qui menace d’exploser, j’ai bu plus que de raison. Le « Blue Lagon » est du genre traite. Il se fait croire doux et gentil, et vous attend au tournant le lendemain matin. En tout cas, tout ça ne me dit pas qui était le type dans les bras duquel je me suis réveillée ce matin. Vu que j’étais dans le plus simple appareil, Morphée, nommé ainsi car il dormait à mon réveil, n’étant pas plus habillé que moi, on n’a pas dû faire que dormir. Apollon lui irait beaucoup mieux, ce type était beau comme un dieu grec. Quel idiote, j’ai quitté l’appart sans lui laisser mon numéro, à moins bien sûr, que j’ai pensé à lui filer hier soir. Chose improbable au vu de mon état ce matin, il y a fort à parier que mon cerveau était bien trop embrumé par les vapeurs d’alcool pour penser à ça. Je ferais mieux de me dépêcher un peu. J’ai besoin d’un antidouleur, d’une douche, d’un café et de me changer. Et peu importe l’ordre dans lequel je vais le faire. En retard pour en retard, autant faire la totale et le lavage des dents avec bain de bouche est franchement obligatoire ! Pourvu qu’aucun prof n’ait réservé le CDI ce matin. Rien qu’à penser aux élèves entrant en trainant les pieds, les chaises et leurs sacs, ma migraine augmente.

Arrivé chez elle, Julie fonça à la salle de bain pendant que le café coulait. Après sa douche, elle s’enfila deux cafés avec un antidouleur. Prix son sac au vol et retourna dans sa Clio, direction le collège. Elle aurait au moins quinze minutes de retard. Son esprit retourna vers les yeux lagon bleu et elle chercha pour la millième fois qui il était.

Julie Marcelin vit la voiture devant elle piler brusquement, elle appuya de toutes ses forces sur la pédale de frein, la voiture derrière fit de même mais ne put l’éviter et poussa la petite Clio dans la voiture devant elle. Un bruit de tôle froissée se fit entendre ainsi que des hurlements venant de toute part. Julie perdit connaissance.

Autour d’elle c’était la cacophonie, des cries et des pleurs s’ajoutait au hurlement des sirènes des pompiers et ambulanciers. Julie referma les yeux, regrettant que l’antidouleur ne fasse pas encore effet. Une belle voix grave et chaude l’appelait doucement : « Julie, réveille toi ma belle, tout va bien se passer ». Elle ouvrit lentement les yeux et croisa ceux couleur Blue Lagoon d’hier soir. Elle devait être morte dans l’accident et son dieu grec l’attendait en souriant.

-« Julie as-tu mal quelque part ? »

            Je lui souriais bêtement en lui répondant qu’au Paradis on ne souffrait pas, ce qui le fit sourire à son tour sans toute fois ôter cette barre d’inquiétude que je pouvais voir sur son front.

-« Julie, tu vas devoir garder ton calme, ta portière est coincée, je vais devoir la découper pour te sortir de là. Tout va bien se passer tu verras. »
            Ethan Granger devait faire vite, lui et ses collègues s’inquiétaient de tout le sang qu’il pouvait voir sur son front, ses vêtements et dans l’habitacle de la voiture. L’incohérence de Julie ajoutait à leur inquiétude. Une fois sortie de la voiture, Julie fut conduite rapidement aux urgences. Là, il s’avéra que le sang sur les vêtements de Julie n’était pas le sien, mais celui de son vernis à ongle « rouge vampire ». Seul celui de son front, dû à un éclat de verre était le sien. Julie qui sortait d’une voiture en accordéon s’en sortait juste avec une légère commotion cérébrale et une légère cicatrice, à la Harry Potter.

 Ethan, sapeur pompier de son état, vint lui rendre visite à l’hôpital avec un magnifique bouquet de fleur bleue. Et l’attendit le jour de sa sortie. Il lui fallu peu de temps pour la convaincre d’emménager chez lui et deux ans plus tard Julie et Ethan se marièrent et firent la fête au « Blue Bird » qu’ils avaient réservés le temps d’une soirée.


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